Chevrolet Suburban Carryall 1936 : une voiture mythique !


Personne ne pouvait imaginer, au milieu des années 30, qu’un humble fourgon transformé en véhicule pour passagers ne soit un jour qualifié d’origine d’une révolution dans les mœurs des automobilistes… 50 ans plus tard !

Les Étatsuniens sont friands des camions surdimensionnés et des V8 de grande cylindrée. Le mythe Bigger is better perdure… Pas surprenant, quand on vit dans un pays d’abondance, où l’essence coule à flot et ne coûte pas cher. Avant les années 80, pourtant, personne n’aurait pu prédire l’engouement qui soutient aujourd’hui les ventes d’utilitaires, grands et petits. Qui sait, si les stratèges des grands fabricants ne les avaient pas honteusement affublés du qualificatif « sport » (avec l’appellation Sport Utility Vehicle ou SUV, bêtement « translatée » en VUS au Québec…), cette folie des grandeurs aurait peut-être pris une autre tournure. Après tout, pour plaire, ces Tonka grandeur nature devaient susciter chez l’acheteur une passion qu’un Suburban Carryall 1936 n’aurait jamais pu engendrer.

Petites rectifications, svp !

Lancé à la fin de 1935, le premier véhicule à porter l’appellation Suburban présentait plusieurs caractéristiques originales pour l’époque, entre autres, sa carrosserie tôlée avec trois banquettes à l’intérieur. Cela permettait de transporter huit passagers et leurs bagages. Ce Suburban n’était toutefois pas un utilitaire comme on l’entend aujourd’hui, avec les raffinements qu’on leur connaît : climatiseur, chaîne audio et vidéo, ABS, ceintures de sécurité, etc.

Le premier Suburban est né à l’époque où le transport ferroviaire constituait le lien privilégié entre les grandes villes et la campagne. Une fois les voyageurs arrivés à destination, disons à la gare de Trois-Rivières, il était nécessaire de les transporter jusqu’à l’hôtel ou à l’usine, avec tout leur « gréement ». Jusque-là, certains carrossiers américains (ils étaient nombreux à l’époque) proposaient ce que nous appellerions aujourd’hui des utilitaires; la société J.T. Cantrell, de Huntington, New York, était sans doute la plus prolifique dans ce créneau. Les stratèges de GM auront sans doute flairé une bonne affaire et ont lancé ce grand fabricant dans la production de masse pour ce genre de véhicule.

Le Suburban n’a donc pas été le « premier utilitaire » de l’histoire, mais plutôt le premier modèle de série du genre. Offert à 685 $ aux États-Unis, il n’était pas beaucoup plus cher qu’une automobile. La berline Chevrolet Master De Luxe à 4 portes de 1936 coûtait 640 $ US.

Il partageait le 6-cylindres en ligne de 3,4 litres et 79 chevaux de la Master, ce qui ne pouvait en faire un foudre de guerre. À l’époque, on ne pensait pas aux pneus à taille basse de 22 pouces ou à une accélération de 0 à 100 km/h en 11 secondes; on prenait le temps de regarder les vaches paître dans les champs…

Remplacé par la… familiale !

La marque Suburban sera retirée du marché en 1947. GM aura alors fabriqué plus de 17 000 exemplaires de ce premier utilitaire pour les marques Chevrolet et GMC. Cette appellation sera reléguée aux oubliettes quelque temps, mais pas le type de véhicule. Il y avait toujours une place pour ce type de fourgon vitré servant à transporter des passagers et de la cargaison dans une ferme ou un grand chantier. Ces utilitaires de la première heure allaient devenir anonymes. D’ailleurs, le stigmate de la sueur de l’ouvrier et du fermier qui les identifiait n’étant pas l’analogie souhaitée par les patrons de grands hôtels, ces derniers allaient leur préférer un nouveau type d’automobile lancé au début des années 40 et de plus en plus populaire : la familiale.